• A2PL contribue à la restauration des plans de l’église de Brach

En 2016, lors de travaux de recherches complémentaires menés au sein des archives des communes en amont de l’exposition De Pierre, de Bronze et de Lumière, notre association a redécouvert un lot de documents exceptionnels : les plans du projet de l’église de Brach, signés d’Auguste Labbé au mois d’octobre 1865.

 L’exposition a rappelé l’historique tourmenté de la nouvelle église Saint-Sébastien, « l’église de briques » du Médoc, restée inachevée : un monument disproportionné par rapport à la taille de la commune, une sorte de projet fou, voulu par les citoyens brachois pour accompagner le mouvement général du diocèse sous l’épiscopat du cardinal-archevêque Donnet, mais aussi en vue de rivaliser avec ses voisines Carcans et Sainte-Hélène. On connaît la suite : la commune plongea dans les difficultés financières, et l’édifice ne fut pas entièrement finalisé. Il n’est pas surprenant, lorsqu’on connaît ce contexte, qu’un architecte bordelais de la stature de Labbé soit intervenu. Nous sommes à l’apogée du Second Empire : Labbé n’a encore que quarante ans, mais il occupe déjà les fonctions d’architecte diocésain. Au nombre de ses réalisations, ce qui fut l’hôtel de police de la rue Castéja, mais aussi l’ancien hôtel des Archives départementales situé rue d’Aviau dans le quartier du Jardin Public et inauguré en 1866. Il va doter le Pays Landescot d’un monument qui compte aujourd’hui parmi les plus distinctifs, ne serait-ce qu’en raison des matériaux employés à sa construction.

Théoriquement, ces 5 plans aquarellés, de format 33 x 49 cm, auraient eu vocation à aboutir dans les archives de la Commission des Monuments Historiques de la Gironde, évidemment impliquée dans le projet : ils en portent d’ailleurs le cachet, ainsi que la signature de Louis de Lacolonge, alors son président. Pour une raison quelconque, et après plusieurs navettes, ils restèrent dans l’armoire de la petite mairie de Brach, soigneusement pliés, et rapidement délaissés. Ils présentent un caractère remarquable pour différentes raisons, l’une des principales étant leur très grande qualité graphique : on appréciera la restitution des teintes des différents matériaux (pierre, bois, brique ou ardoise), le niveau de détail et la précision du trait, jusqu’aux ferrures des portes ou à la balustrade de fer forgé de la tribune. Selon un code souvent pratiqué, un personnage, que l’on aperçoit notamment sous le porche tenant une perche de 3 mètres de longueur, fournit l’échelle. On peut aussi admirer le jeu des ombres, comme sur le détail ci-contre représentant le bras Est du transept dont la masse est projetée sur la toiture à pan unique de la sacristie adjacente. Certaines vues nous dévoilent également l’ossature de l’édifice, avec les pièces de charpente de la voûte. Nous sommes ici bien loin de la PAO : ce sont de véritables œuvres, minutieusement réalisées.

Tous signés de Labbé, ce qui renforce leur valeur, ces plans, passés par les mains d’autorités successives, constituent également un instantané d’histoire locale : les conseillers municipaux, représentants de familles authentiquement landescotes – Pontet, Ycard, Barreau, Seyran... – les ont ornés de leur paraphe maladroit, ainsi que le maire, Jean Gaillard, dont l’épouse sera choisie ensuite pour marraine de la nouvelle cloche. Enfin, sur le plan de l’analyse historique, ces documents prennent toute leur dimension dans la mesure où ils correspondent à l’édifice qui sera effectivement réalisé : la pose solennelle de la première pierre se déroulera le 27 avril 1867, pour une première interruption de chantier dès 1868. Le procès-verbal de réception définitif, lui, n’aura jamais lieu : Labbé mourra en 1881 sans avoir vu l’achèvement de son projet. Le transfert de l’ancien cimetière accompagnait la construction de l’église, lui aussi sous l’égide de Labbé. Deux autres plans pourraient faire l’objet d’une restauration : l’un, remarquable témoignage de la physionomie de Brach au milieu du XIXe siècle, représente le bourg à l’époque des travaux ; l’autre, daté de l’année 1878 et signé de l’architecte Achille Grange, correspond à la création de l’école mixte de la commune, dont l’histoire a été étudiée en 2017 dans le cadre d’une extension de l’exposition d’A2PL 150 ans d’école publique en Pays Landescot

bras transept est
détail porche
chœur et sa charpente
tribune
état endommagement façade et clocher

Toutes ces pièces ont souffert du temps et de l’oubli. Les règles de la conservation des documents figurés, cartes et plans de moyen et de grand format tout particulièrement, imposent la mise à plat, ce qui répond à des conditions de stockage dans un mobilier adapté dont les communes sont habituellement dépourvues, ou bien, a minima, dans des cartons à dessins de dimensions correspondantes. Ceux qui nous occupent ont vécu pendant plus d’un siècle pliés en quatre : l’usure est très nette à la pliure, altérant le dessin, la poussière, les taches, ne les ont pas épargnés. Le plan de la façade et du clocher, comme on peut le constater ci-dessus, est le plus endommagé. En 2017, un devis de restauration a été établi à notre sollicitation par l’Atelier du Patrimoine, avec lequel nous avions déjà collaboré. Il a été soumis à l’approbation du conseil municipal au mois de novembre. Un ordre de priorité a été défini, le principe d’un échéancier a été évoqué, le taux de participation financière de la commune étant tributaire du résultat de l’action de mécénat associatif aujourd’hui engagée. L’objectif est évidemment de parvenir à restaurer les différents lots dans les meilleurs délais.

Afin de restituer à cet ensemble de plans toute leur beauté et de permettre leur valorisation, A2PL a tiré partie du partenariat proposé lors de son Assemblée Générale 2017 par l’Académie Internationale de Musique Hourtin Médoc, qui débute sa nouvelle saison par un ensemble de trois soirées intitulées Concerts de prestige dans les églises du Pays Landescot. Le premier rendez-vous aura lieu le mardi 17 avril à 20 h 30 dans l’église de Brach, selon le programme joint (entrée : 15 €, à régler sur place). C’est également l’occasion d’admirer les œuvres que contient cette église méconnue : la statue de saint Sébastien classée MH, la magnifique série des clefs de voûtes armoriées peintes, les deux autels de marbre latéraux commandés en 1869 à la maison Larroque à Bordeaux. En participant à cet évènement musical, vous contribuerez, à hauteur de 20 % des recettes, au projet de restauration. Les dons seront également acceptés : A2PL a engagé les démarches nécessaires pour la reconnaissance officielle du statut d’intérêt général, afin de pouvoir délivrer en fin d’année 2018, si elle l’obtient, les reçus fiscaux qui rendent ces dons déductibles à hauteur de 66 % de la somme versée.

 Nous souhaitons souligner l’implication dans ce projet de la commune de Brach à travers son maire, Didier Phoenix, et l’adjointe en charge des affaires culturelles, Carmen Picazo, qui ont soutenu la proposition d’A2PL. Restaurés, protégés, reproduits sous forme numérique, ces pièces pourront pleinement intégrer l’ouvrage De Pierre, de Bronze et de Lumière dont l’édition est programmée pour l’année 2019, tout en contribuant au rayonnement du patrimoine de la commune qui vient d’être distinguée par le Trophée de la réussite des territoires 2018.